Dans cet air nouveau, les grands cépages rouges ligériens ne sont pas tous logés à la même enseigne. Chacun avec sa manière de vieillir sous ce soleil de plomb.
Cabernet franc : L’icône sous tension
Le cabernet franc, roi rouge de la Loire, doit à sa maturité tardive tout son éclat. De la Touraine à l’Anjou, on l’a toujours aimé pour sa capacité à mûrir doucement, sur la durée. Mais c’est aussi ce qui l’expose à la fougue du climat. Sous la chaleur, il mûrit trop vite : adieu la fraîcheur mentholée, bonjour les fruits noirs compotés, la hausse des titres alcoométriques (souvent 13,5 % aujourd’hui contre 11,5 % il y a 30 ans), les tanins denses au risque de perdre la dentelle du style ligérien (Source : InterLoire, chiffres 2022).
- Points forts : Résiste au gel tardif mieux que le merlot grâce à un débourrement plus tardif ; assez plastique pour supporter des variations modérées de climat.
- Faiblesses : Risque de blocage de maturité en période de canicule ; acidité fond rapidement ; perte d’identité si vendangé trop mûr.
Pineau d’Aunis, le frondeur
Épice et fluidité. Le pineau d’Aunis, longtemps dans l’ombre du cabernet, sort du bois. Doté d’une précocité modérée, il résiste plutôt bien à la sécheresse grâce à sa vigueur végétative, mais craint beaucoup la chaleur excessive et les coups de chaud au moment de la véraison. Son atout : il garde une certaine légèreté et de la vivacité, mais l’aridification des sols (certaines zones d’Anjou perdent jusqu’à 30 % de leur réserve hydrique annuelle depuis 1995, DREAL Pays de la Loire) le fragilise.
- Points forts : Capacité à offrir des vins frais sur millésime chaud ; structure légère.
- Faiblesses : Sensibilité à la sécheresse sur sols peu profonds ; rendement variable.
Grolleau et gamay, les oubliés du soleil fort
Le grolleau traîne une mauvaise réputation, longtemps bu pour la douleur, pas pour le plaisir. Il revient aujourd’hui porté par un nouveau souffle : modeste en alcool, rare par sa chair de fruit acidulée. Mais sa précocité le pousse à l’extrême lors de années chaudes, lui faisant perdre son peps.
Quant au gamay, son cycle court l’expose au mur de chaleur du mois d’août. S’il mûrit trop vite, il offre des vins plats, sans grâce ni ressort.
- Points forts : Faibles degrés naturels, rarement au-dessus de 12 %; légèreté.
- Faiblesses : Accumulation rapide des sucres lors de chaleurs extrêmes ; acidité volatile.